Auteur : Catherynne M. Valente
Éditeur : Panini Books (collection Éclipse)
Publié en : 2007
Ce livre m'aurait laissée bien indifférente en rayon, et il a fallu un club de lecture pour me le mettre entre les mains. Autant vous le dire tout de suite, je suis sidérée par ma bêtise qui me fait mettre d'office des livres de côté à cause de préjugés sans fondements, car j'ai été totalement envoûtée par ce savant mélange de révolution russe et de mythologie slave concocté par Catherynne M. Valente.
Immortel nous relate l'histoire de Maria Morevna, une jeune fille qui a vu ses trois sœurs se marier à des oiseaux devenus hommes, qui a découvert que sa maison abrite un conseil de lutins, qui a perçu le "monde nu" dans son propre monde envahi par les nouveaux principes de camaraderie et de partage instaurés par la révolution russe. Maria n'attend plus qu'une chose, c'est de voir un oiseau la demander en mariage à son tour. Mais sa destinée est toute autre, car Maria va devenir la femme d'un démon, le Tsar de la Vie, Kochtcheï l'Immortel. En le suivant dans le Pays de la Vie, Maria ne se doute pas qu'elle va rencontrer un monde plein de magie, de personnages colorés et loufoques, attendrissants et horrifiants à la fois, un monde beau et cruel qu'elle devra apprendre à aimer et à apprivoiser, et qu'elle va devoir défendre dans cette lutte sans fin entre la Vie et la Mort.
Dans cette histoire totalement inattendue, Catherynne M. Valente reprend les grandes lignes des contes traditionnels russes, en les mêlant habilement aux éléments politiques de ce XXe siècle. Tout s'imbrique parfaitement, et même si la mythologie slave, ses protagonistes et leurs aventures sont mal connus de notre culture française, c'est un réel plaisir d'arpenter le web en parallèle de cette lecture afin de découvrir qui sont Maria Morevna, Kochtcheï l'Immortel, Baba Yaga, ainsi que la multitude de personnages que l'on rencontre tout au long de l'histoire et qui font partie intégrante du folklore de ce beau pays.
L'écriture est belle, l'histoire est tellement bien contée qu'on a envie de prendre le temps de la découvrir, sans hâte, de la savourer... La traduction a été vraiment bien écrite, c'est fluide, ça se lit tout seul. Et la puissance de ce texte ressort sans peine, entre amour et mort, beauté et violence, passion et destinée.
Cette lecture d'Immortel a été un réel coup de cœur, et je vous la recommande sans modération.
Dans une cité au bord de la mer qu'on appelait jadis Saint-Pétersbourg, puis Petrograd, puis Leningrad, puis encore, bien après, Saint-Pétersbourg, se dressait une longue maison étroite, dans une longue rue étroite. Près d'une longue fenêtre étroite, une enfant en robe bleu pâle et chaussons vert pâle attendait qu'un oiseau vint l'épouser.
Ainsi, mieux vaut être fort et cruel que juste. Au moins, l'on mange mieux. Et notre moralité dépend davantage de l'état de notre estomac que de notre nation.
Une carte de rationnement dit : Nous vous avons alloué telle portion de vie. Ou encore : Voici telle portion de mort que nous tiendrons à l'écart de votre porte. Mais plus maintenant. Désormais, elle annonce : À Leningrad, il n'y a qu'une quantité limitée de vie. Ou encore : La seule chose qui n'est pas rationnée, à Leningrad, c'est la mort.
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